Le ciseau des courbes de collecte et de consommation de produits laitiers à l’échelle de l’Europe présage d’un prix du lait durablement cranté au-dessus de 400 € la tonne, analyse Christine Goscianski, économiste à l’IDELE. En euros constants (corrigé de l’inflation), le prix du lait de 2023 et 2024 ne fait que rattraper celui qui avait cours au début des années 2000 tempère Anne-Lucie Menier du CERFrance Brocéliande en s’appuyant sur la trajectoire des résultats économiques des 2230 exploitations spécialisées en lait adhérant au CERFrance Brocéliande.
La rémunération des producteurs laitiers est très dépendante du prix de vente du lait. Christine Goscianski, spécialiste de l’économie des filières lait de vache à l’IDELE, table sur un prix du lait durablement cranté au-dessus de 400 € la tonne. Son analyse repose sur une consommation intérieure de produits laitiers qui reste dynamique (sauf pour le lait de consommation liquide et les desserts lactés frais) tandis que les prévisions de collecte sont atones sur l’ensemble de l’Europe. Un point noir cependant : la descente en gamme des achats des consommateurs a entrainé une baisse du prix de vente moyen de 2,3 % entre 2023 et 2024 (Pour en savoir plus, nous vous invitons à lire l’analyse complète de Christine Goscianski sur notre site internet).
« En euros constants, l’amélioration du revenu laitier par UMO doit beaucoup à l’augmentation de la productivité du travail«
Anne-Lucie Menier chargée de veille économique au Cerfrance Brocéliande nuance ces bonnes nouvelles sur le prix du lait en rappelant qu’en euros constants (c’est-à-dire corrigé de l’inflation base 100 en 2020), le prix du lait payé aux producteurs en 2023 (470 € / 1000 litres) n’a augmenté « que de » 55 € / 1000 litres depuis l’an 2000.
Le résultat en euros courants et par 1000 litres des 2230 exploitations spécialisées en lait adhérant au CERFrance BROCÉLIANDE (départements 35 et 56 ) a doublé entre 2021 et 2023 pour s’établir à 126 € par 1000 litres de lait. Mais, en euros constants, il a reculé de 6 € par 1000 litres de lait par rapport à l’an 2000 ! La baisse tendancielle du résultat par 1000 litres de lait entre 2009 et 2021 ainsi que le contexte inflationniste depuis 2022 donnent l’illusion que la période actuelle est florissante pour le revenu laitier. Alors qu’il ne s’agit, en réalité, que d’un rattrapage par rapport à la période 2000 – 2008.
Le résultat par UMO d’exploitant (non-salarié) a, lui, presque triplé sur la dernière décennie pour atteindre 52 000 € en moyenne. Mais, ce bond s’explique pour moitié par l’augmentation de la productivité du travail puisque le litrage produit par UMO est passé de 250 000 litres à 411 000 litres pendant cette même période. En 2023, le résultat par UMO varie de moins de 16 000 € pour le quart de ceux ayant le revenu le plus bas à plus de 90 000 € pour les 25% ayant le meilleur revenu. Le service d’analyse économique du CERFrance explique cet écart de 1 à 6 par l’amplitude de la productivité du travail ainsi que par les différences d’efficacité économique qui impactent autant le revenu que la productivité.
Les 2230 exploitations spécialisées en lait en chiffres du CERFrance Brocéliande
- Départements 35 et 56.
- 1,9 UTH (dont 0,32 salarié). 342 000 litres de lait / UTH (44 VL / UTH).
- 97 ha de SAU dont 70 ha de SFP (45 % de maïs ensilage). (9270 litres / ha de SFP).
- 649 000 litres de lait vendus avec 83 vaches laitières.
- 684 000 € de capital d’exploitation (1053 € / 1000 litres de lait)