par INTERVIEW – Le méthane entérique 1 représente 60 % des gaz à effet de serre émis par une exploitation laitière. Plusieurs pistes sont possibles pour en réduire les émissions à l’échelle d’une ferme comme diminuer le nombre de génisses de renouvellement, réduire les périodes improductives ou intervenir sur l’alimentation. Des solutions alimentaires permettent de bloquer la synthèse du méthane dans le rumen. Sur le marché européen, seul Bovaer® produit par DSM-Firmenich est reconnu officiellement pour ce bénéfice environnemental. Le Mag XXLait a demandé à Patrick WIECZOREK, Spécialiste Ruminants de l’entreprise, de nous présenter cet additif.
XXLait : Bovaer®, qu’est-ce que c’est ?
Patrick Wieczorek (PW) – Bovaer® est un ingrédient alimentaire qui réduit les émissions de méthane entérique des vaches laitières de 30 % en moyenne. Il a reçu un avis positif de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) pour une utilisation au sein de l’Union européenne. L’EFSA confirme l’efficacité de Bovaer pour diminuer la production de méthane par les vaches laitières, ainsi que son innocuité. Aujourd’hui, c’est le seul additif autorisé pour la nutrition des vaches laitières qui peut revendiquer officiellement ce bénéfice environnemental.
XXLait : Quel est son mode d’action ?
PW – Dans le rumen, le gaz carbonique (CO2) et l’hydrogène (H2) issus du processus de digestion de la matière organique se combinent en méthane (CH4) qui est expulsé dans l’air par les rots des vaches. Le méthane est un gaz à effet de serre 28 fois plus puissant que le CO2. Bovaer bloque la transformation du CO2 en CH4 ; la vache rejette donc moins de méthane dans l’atmosphère, ce qui est bénéfique dans la lutte contre le réchauffement climatique. L’effet de Bovaer est provisoire et ne dure que quelques heures. C’est pourquoi, l’animal doit en ingérer régulièrement dans sa ration pour que l’effet soit continu dans la journée. Bovaer ne peut être utilisé que lorsque les animaux sont à l’auge et pas encore pendant le pâturage. Des solutions sont à l’étude pour l’utiliser dans ce dernier cas.
XXLait : Quelle est son efficacité ?
PW – Plus de 50 essais en élevages (dont plus de la moitié sur des vaches laitières) dans 15 pays ont permis de mesurer une réduction moyenne de 30 % des émissions de méthane. Ce niveau d’efficacité a été validé par l’EFSA. L’effet de Bovaer dépend de la composition de la ration reçue. Il est moindre avec des rations riches en fibres (typiquement les rations à base d’ensilage d’herbe, d’enrubannage ou de foin) et lorsqu’il y a une complémentation en matière grasse. Par contre, son efficacité est supérieure pour les rations à base d’ensilage de maïs.
30 % : c’est, en moyenne, le niveau de réduction des émissions de méthane des vaches recevant Bovaer dans leur alimentation
XXLait : Le comportement des animaux et sur les résultats zootechniques sont-ils modifiés par Bovaer ?
PW – Aux Pays-Bas, 160 élevages livrant leur lait à la coopérative laitière FrieslandCampina utilisent Bovaer depuis deux ans, ce qui nous permet de confirmer sur une période assez longue les résultats de nos essais en station expérimentale. Bovaer n’aucun effet positif ou négatif visible sur la production laitière, sur la santé ou sur la reproduction des animaux. Les éleveurs n’ont observé aucun changement dans le comportement à l’auge de leurs animaux.
XXLait : Comment apporter Bovaer aux vaches ?
PW – Il se présente sous la forme d’une poudre. La dose quotidienne à distribuer par vache est proportionnelle à la quantité de ration ingérée à raison de 60 mg de Bovaer par kg sec ingéré. Ce qui ne représente que 1,3 à 1,7 g par vache et par jour en Bovaer pur 2 ! Qui plus est, à consommer régulièrement sur 24 heures. Il est donc le plus souvent incorporé dans la formule d’un minéral ou un aliment à la carte.
XXLait : Quel est son coût d’utilisation ?
PW – Le coût quotidien d’utilisation dépend des quantités de ration ingérées. Il est compris entre 25 et 28 centimes d’euros par vache et par jour, soit entre 7 € et 10 € par 1000 litres de lait produit. Le retour sur investissement se fera par une compensation de la réduction des émissions d’équivalent CO2. Par exemple, le Groupe Bel et l’APBO3 ont conclu un accord pour verser une prime de 10 € par 1000 litres de lait sur la période d’utilisation. L’utilisation se fera sur la base du volontariat, chaque éleveur choisira de distribuer ou non Bovaer.
